Mutations des danses afro-amérindiennes dans la Caraïbe : une analyse des faits traditionnels et folkloriques à partir l’ethnologie en Haïti

Abstract

Nos lectures des travaux de l’ethnologie haïtienne naissante (1920-1960) et même après soulignent le traitement d’une certaine « exceptionnalité » [1] du fait culturel haïtien que Benedicty-Kokken et al. (2016) qualifient d’ambivalence épistémique. Cette exemplarité signifiée, tente d’extraire Haïti de l’ancrage historique et culturel caraïbéen. Du coup, les traditions et le folklore de ce territoire « singulier » seraient autogénérés. Pour en discuter, cet article recourt à trois ouvrages phares du mouvement indigéniste de la période. Si ces écrits valorisent les danses traditionnelles et les danses folkloriques, ils ne les insèrent pas pour autant dans un narratif régional constitutif du fait culturel caraïbéen. La transversalité ou non des traditions et du folklore comme pratiques culturelles n’est pas non plus précisée. Si pour ces trois savants de la période, ces deux notions sont censées synonymes, les observations ethnographiques réalisées entre les années 2022 et 2023 sur l’usage des traditions et du folklore en Haïti ne permettent pas d’énoncer avec certitude les frontières de ces deux catégories. Or, l’emploi de l’une ou de l’autre par des porteurs de traditions, [3] médiateurs culturels, collecteurs, troupes et écoles de danse varie. En prenant en compte les trois variables - lieu, contexte d’exécution et profil social du locuteur, cet article invite à réfléchir sur les « branchements » [3] des danses haïtiennes, mais surtout sur leur ancrage caraïbéen comme un fait culturel non exceptionnel.